Dans nos campagnes, le gros linge (draps, torchons, serviettes) était souvent lavé à la cendre deux fois par an, au printemps avant les Rameaux, et à l’automne vers la Toussaint. Dans ce dernier cas, les femmes faisaient la « bugée ou bugeaille » avant de tuer et cuire le cochon.Les draps étaient changés chaque mois. Après un rapide lavage à l’eau claire puis plus tard au savon de Marseille, suivi d’un rinçage, les draps – parfois plusieurs dizaines de paires étaient séchés puis étendus dans les greniers en attendant le jour de la « bugée ». On disait « essanger ». La bugée avait pour but de faire bouillir le linge afin de lui rendre toute sa blancheur. La cendre qui contient des phosphates remplaçait la lessive. La cendre, bien tamisée, était préparée à l’avance et ensachée dans des sacs de lin ou de chanvre. La veille de la « bugée », les draps et le linge étaient descendus des greniers et mis à tremper dans des cuves. Ils étaient ensuite enlevés et tordus pour évacuer l’eau.
La lessive proprement dite était effectuée dans une cuve appelée « ponne » qui possédait un écoulement (le tapon) en partie inférieure. On y déposait des sarments de vigne, des tuiles ou d’autres éléments, un ou plusieurs sacs de cendre sur toute la surface. On y étendait ensuite le linge. Le feu avait entre-temps été allumé sous un chaudron. L’eau bouillante était recueillie à l’aide d’un « potin » en fer blanc (sorte de casserole à manche) pour être déversée sur le linge. L’eau traversait le linge, la cendre, était récupérée en ouvrant le tapon. Le jus (« lessis », d’où le nom « lessive ») ainsi récupéré était réchauffé dans la « poêlonne », et on recommençait l’opération appelée « faire rouler la lessive » inlassablement toute la journée. Imaginez le travail en comparaison avec les lessives d’aujourd’hui !
Le lendemain était consacré à la « laverie ». Le linge sorti des « ponnes » était chargé sur des charrettes ou brouettes, puis amené au lavoir pour le rinçage.